Cette interview a été réalisée dans le cadre d’une démarche lancée par le CRT pour créer avec les acteurs du tourisme un « écosystème d’innovation touristique ».

Portrait Livia Avaltroni

Livia Avaltroni

Directrice opérationnelle du Campus d’excellence Patrimoines,
Métiers d’Art et Tourisme (PatMAT)

« La clef du succès pour innover et favoriser le changement, c’est de collaborer autour de projets ! »

Livia Avaltroni est la directrice opérationnelle du Campus d’excellence Patrimoines, Métiers d’Art et Tourisme (PatMAT). L’équipe du Campus accompagne une soixantaine de partenaires (enseignants, institutionnels et professionnels) à la mise en œuvre de projets collaboratifs pour favoriser l’expérimentation de nouvelles pratiques sur les champs des compétences et de l’information aux métiers, avec pour objectif de rendre les filières de son périmètre plus attractives et compétitives.

Livia nous parle des enjeux de coopérations pour la formation, nous fait part de ses envies de liberté en matière de découvertes touristiques et nous partage sa vision des écosystèmes d’innovation en lien avec le tourisme et le patrimoine auxquels elle a pu contribuer.


Bonjour Livia, qui êtes-vous ?

Bonjour, je suis Livia Avaltroni, la directrice opérationnelle du Campus d’excellence Patrimoines, Métiers d’Art et Tourisme, connu sous le nom de PatMAT. Nous portons le nom de « campus », mais nous n’accueillons pas d’étudiants ! Ce n’est ni une structure, ni un établissement de formation, mais un projet initié par la Région académique Centre-Val de Loire et le Conseil régional du Centre-Val de Loire, porté par l’université de Tours au nom d’un collectif de 32 structures. Il s’inscrit dans une dynamique nationale : celle des « Campus des Métiers et des Qualifications ». Ces Campus sont des réseaux qui rassemblent sur un territoire donné des établissements de formation, des entreprises et des institutions autour d’un secteur d’activité spécifique pour qu’ils travaillent ensemble à la montée en compétences des apprenants.

Notre mission est de faciliter la mise en synergie de la formation avec les attentes et les besoins des acteurs économiques. Dans notre cas, le tourisme est au cœur du Campus, avec la volonté de faire travailler ensemble les acteurs qui participent au rayonnement de notre territoire : ceux qui contribuent à restaurer et à faire vivre les patrimoines, à entretenir les jardins, mais aussi à assurer l’accueil des touristes.

Mon travail est de faciliter les rencontres, identifier les interactions possibles, mettre en place des actions qui répondent aux besoins.

L’ensemble des filières du Campus d’excellence PatMAT souffrent d’un manque d’attractivité et de vocations, alors qu’il s’agit de métiers de passion et porteurs de sens. Notre objectif est donc d’inciter les jeunes (et moins jeunes) à s’y engager en développant par exemple des dispositifs qui contribuent à leur attractivité.

Est-ce que PatMAT porte des projets d’innovation touristique ?

PatMAT innove en matière d’activité touristique par l’élaboration d’actions concrètes en matière de pédagogie. Il assure aux porteurs de projets un accompagnement, il leur permet de bénéficier d’un appui en ingénierie, d’un réseau, de développer et expérimenter des dispositifs…

J’ai parlé du problème d’attractivité de certains métiers. Dans ce domaine, nous avons justement travaillé avec l’UMIH Centre-Val de Loire (l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie). L’objectif était de donner une image plus moderne des métiers de l’hospitalité. Nous avons réuni des acteurs de divers horizons pour réfléchir ensemble à un dispositif innovant et itinérant afin d’aller au plus près des territoires.  Ce travail a abouti à un triporteur qui est présenté lors d’évènements. Il propose des jeux sur les métiers, 2 livrets « Collégien » et « Demandeur d’emploi » en réalité augmentée et une application numérique pour aller plus loin. Il porte le nom de « Un métier à la clef ». Après avoir été incubé au sein du Campus, le dispositif est aujourd’hui coordonné par l’UMIH Centre-Val de Loire.

On peut retenir de cette action que c’est par le projet qu’on accompagne les acteurs du territoire à s’outiller et à innover.

Côté formation, notre mission est aussi d’accompagner les enseignants en favorisant des rencontres entre eux et avec des professionnels et en créant des synergies avec des actions territoriales d’envergure qui permettent de valoriser les projets pédagogiques des apprenants et de leurs formations.

La clef du succès pour innover et favoriser le changement, c’est de collaborer autour de projets !

Parlons de vous. Qu’est-ce que vous aimez lorsque c’est vous qui êtes touriste ?

Vous savez, j’ai grandi à Rome, dans cette ville de patrimoine à ciel ouvert, où l’on passe de l’Antiquité à la Renaissance simplement en se baladant… Alors, j’aime la liberté de me rendre là où je veux, quand je veux !

J’aime me nourrir du patrimoine, qu’il soit naturel ou culturel, que ce soit par la technologie ou de manière classique. J’aime avoir toutes ces possibilités, la liberté de choisir entre les sites et de la manière de les vivre.

Le numérique permet de donner une autre dimension à l’expérience de visite. S’il n’est pas la solution à tout, il permet pas mal de choses, comme d’imaginer d’autres formes de découverte en complément de la visite réelle : faire renaître des édifices disparus, voyager dans le temps… C’est un complément, et il n’y a rien de mieux, aussi, que de se retrouver soi-même dans le patrimoine, sans d’autres formes de médiation !

Quelle expérience mémorable aimeriez-vous qu’un touriste puisse vivre lors de son séjour en Centre-Val de Loire ?

Nous sommes dans une région qui s’appréhende par l’itinérance. Aujourd’hui, il existe de nombreuses manières de découvrir le territoire (cyclotourisme, randonnées pédestres, tourisme fluvial, etc.). J’aimerais que l’on puisse valoriser davantage l’insolite au-delà de l’axe ligérien.

Il y a la Renaissance, les châteaux et les jardins… Nous avons aussi une gastronomie remarquable et des restaurateurs sensibles à une alimentation durable qui jouent la carte des circuits courts tout en préservant notre patrimoine culinaire… Mais il y a aussi des artisans et nous pourrions donner envie de pousser la porte de leurs ateliers ou encore de manufactures en développant le tourisme de savoir-faire.

Il faudrait que nous travaillions ensemble à mieux faire connaître cette diversité pour que chaque territoire puisse profiter du tourisme ! Ensemble, nous devons contribuer à valoriser toutes les facettes de l’identité régionale.

Quel rôle pourrait jouer un écosystème d’innovation touristique pour y contribuer ?

L’écosystème doit être un espace d’échanges qui nous permet de réfléchir librement et sans aucune limite au tourisme de demain. Réfléchir au tourisme de demain, c’est également anticiper des tendances et s’adapter à un monde en mouvement.

C’est à partir de ces interactions que des projets d’intérêt partagé pourront émerger, des projets qui viendront alimenter un collectif régional et répondre en même temps à des stratégies des acteurs du tourisme régional. C’est par l’action que l’on accompagne la transformation des professionnels et des politiques publiques.  

En outre, le développement de projets permettra à l’écosystème de se structurer et contribuer à la recherche de financements structurants, car on peut avoir de bonnes idées, mais si l’on n’a pas les moyens, on reste limité.

Pour insuffler un changement, l’identification d’un coordinateur-pilote, en l’occurrence le CRT Centre-Val de Loire, est importante, mais pas suffisante : il faut que chacun des acteurs de l’écosystème y consacre du temps, y contribue activement, qu’il l’incarne. Je travaille depuis maintenant près de dix ans au service d’écosystèmes d’innovation patrimoniale et touristique, et je mesure l’évolution de la réflexion qui a été engagée. Cet écosystème d’innovation touristique en émergence s’inscrit pleinement dans la poursuite d’une action engagée par le territoire depuis plusieurs années.

Le Campus, quant à lui, intègre l’axe formation : un volet de l’écosystème qui permet de faire remonter des problématiques d’emploi et de compétences. Si l’on innove, il est fort probable que de nouveaux besoins en compétences émergent. Il faut alors que la formation puisse y répondre de manière souple et agile.

À l’issue de notre discussion, comme définiriez-vous l’innovation touristique ?

Pour moi, l’innovation, c’est la recherche permanente d’idées nouvelles qui contribuent à un changement de paradigme. Je ne doute pas que le Campus saura épauler les partenaires de cet écosystème à appréhender le changement.

Contact : Sophie Martinez Almansa, Responsable Innovation, Territoires et Compétences
07 84 16 03 81 – s.martinez@centre-valdeloire.org

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